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L’inévitable Exit et comment s’y préparer

Mis à jour le 01/09/2023

Même les fondateurs de PME traditionnelles qui créent une entreprise censée durer toute leur carrière prendront un jour leur retraite et devront se demander ce qu’ils vont faire de leur entreprise. Ceci est encore plus vrai pour les startups à forte croissance, dont les fondateurs ont souvent l’intention de se retirer après quelques années seulement.

Il existe de nombreuses façons pour les fondateurs de sortir d’une entreprise, allant de la succession à un membre de la famille à une introduction en bourse (IPO), en passant par la vente à des investisseurs stratégiques ou à des managers. L’objectif de ce post est de permettre aux fondateurs d’envisager globalement le type d’exit auquel ils seront un jour confrontés et de leur donner des outils concrets pour s’y préparer le plus tôt possible.

Pour ce faire, nous distinguerons deux grandes catégories: d’une part, les entreprises qui doivent doper leur croissance grâce à un financement de fonds propres (dit financement en « equity »), et d’autre part, les entreprises « bootstrapped », où les ressources des fondateurs suffisent à alimenter la croissance visée.

Exits typiques des entreprises financées en equity

Financement en equity en général

Nous faisons ici référence aux entreprises qui ont reçu des ressources apportées par des investisseurs tiers en échange de droit sociaux (généralement des actions de la startup). Les entreprises typiquement concernées sont les startups technologiques ou les scale-ups qui ont besoin d’un financement extérieur pour mettre leur produit sur le marché ou faire croître leur activité.

D’un point de vue général, les investisseurs en equity – quel que soit le stade de maturité qu’ils visent – sont plutôt réfractaires au risque. Cela se traduit par une volonté d’investir dans des cibles dont les processus et la gestion interne sont irréprochables ; ce qui est d’autant plus vrai dans les investissements tardifs (dits « late stage »). En effet, une gestion et des processus désordonnée est souvent considérée comme le signe de problèmes plus profonds au sein de la cible.

Un bon exemple est celui d’une entreprise qui n’a pas de contrats de travail écrits : d’un point de vue juridique, c’est parfaitement acceptable ; cependant, cela augmente l’incertitude et le risque pour un investisseur potentiel en ce qui concerne les litiges potentiels en matière de RH. Cet exemple particulier ne constitue pas nécessairement un obstacle à la conclusion d’un accord, mais il peut conduire à une évaluation plus faible de la valeur de l’entreprise pour tenir compte du risque.

Les investisseurs en equity recherchent généralement une exit après une forte croissance sur une courte période. Les fondateurs doivent être conscients que leurs investisseurs auront tendance à insister fortement sur la croissance rapide et les exits rapides. Il est ainsi important de discuter de ce point avec les investisseurs et s’assurer que leurs visions respectives sont alignées.

Exits typiques des entreprises financées en equity

Étant donné que les sociétés reçoivent généralement du financementsur la base de plans de croissance très clairs et optimistes, elles auront généralement connu une croissance exponentielle au moment où elles atteignent la phase d’exit. Leur valeur d’entreprise sera donc, à ce moment-là, souvent suffisamment élevée pour limiter le cercle des acheteurs potentiels.

Cela entrave largement la possibilité de ventes commerciales à des particuliers (y compris à des membres de la direction de l’entreprise, par exemple) ou à des PME. Par conséquent, les exits typiques des entreprises financées par des fonds propres sont les suivantes :

  • « Buy-out » stratégique par un investisseur existant : Si l’un de vos actionnaires a investi sur la base de considérations stratégiques (son activité est liée à celle de la cible, par exemple en tant que concurrent, client, fournisseur, etc.), il pourrait être intéressé par le rachat des autres actionnaires, y compris les fondateurs.
  • « Buy-in » stratégique : Les investissements stratégiques dans votre entreprise peuvent prendre la forme d’un rachat de la totalité du capital social par un tiers. Il peut s’agir d’une stratégie d’exit très intéressante, surtout si les investisseurs actuels de votre entreprise l’ont rejointe principalement sur la base de considérations financières.

L’exemple typique d’un rachat stratégique serait l’achat d’un logiciel à forte croissance par l’une des sociétés dites GAFAM de la Big Tech.

  • Introduction en bourse (IPO) : Si votre société s’est beaucoup développée, une exit possible pourrait être une introduction en bourse de ses actions. Ce type d’exit est assez rare, et il est très difficile de prévoir si cette option est réaliste avant un stade de croissance avancé.

Comment se préparer à ces exits ?

Ces plans d’exit ont en commun qu’ils seront menés par des personnes habituées à acheter des entreprises et bien conseillées. Par conséquent, elles seront méticuleuses dans le processus de due diligence et considéreront généralement les petits défauts de structure juridique, de système de gestion ou d‘intendance (« corporate housekeeping ») comme des signes de risque. De tels indicateurs de risque peuvent suffire à rompre l’accord ou à réduire la valeur de l’entreprise en discussion.

Les entreprises concernées par ces exits doivent donc s’efforcer d’avoir une gestion et une documentation autant irréprochables et complètes que possible, d’être bien structurées et de veiller à ce que les risques soient réduits au minimum. Voici quelques exemples de sujets auxquels l’équipe de direction devrait être attentive :

  • Le corporate housekeeping de l’entreprise :
    • les assemblées générales annuelles ;
    • des réunions trimestrielles du conseil d’administration depuis le début, au cours desquelles des discussions sont tenues et documentées sur les opérations du trimestre écoulé et les perspectives pour le prochain ;
    • toute décision relevant de la responsabilité du conseil d’administration doit être documentée sous la forme d’une résolution ou d’un procès-verbal (à tout le moins par e-mail) ;
    • la délégation du conseil d’administration à la direction doit idéalement se faire sur la base de règlements clairs.
  • Questions liées aux ressources humaines (contrats de travail bien conçus et bonne gestion des employés, règles et règlements internes clairs pour les employés).
  • Des contrats écrits sont établis et vérifiés pour les relations de l’entreprise avec ses fournisseurs, ses clients et ses employés.
  • Des politiques de protection des données sont mises en place et appliquées.
  • Les éventuelles autres questions réglementaires sont analysées et traitées de manière adéquate (en particulier si l’entreprise est active dans la biotech ou la medtech par exemple).

L’autre considération importante pour les acheteurs d’entreprises financées par equity est que toute la valeur de l’entreprise soit acquise au moyen de la transaction. Cela signifie que le savoir-faire et les activités de l’entreprise ne doivent pas, dans la mesure du possible, être liés aux fondateurs.

Si tel devait être le pas le cas, la transaction pourrait en effet être remise en doute  ou, à tout le moins, la valeur de l’entreprise pourrait être fortement réduite. En outre, cela pourrait obliger les fondateurs à rester impliqués dans l’entreprise beaucoup plus longtemps après la clôture de leur exit.

Dès le début de l’entreprise, ses fondateurs devraient donc avoir pour objectif de placer toute la valeur de l’entreprise dans la société et de la rendre indépendante de leurs personnes. En fonction du domaine d’activité concerné, les tactiques suivantes peuvent être envisagées :

  • développer des stratégies de marketing numérique plutôt que de s’appuyer sur les réseaux personnels des fondateurs pour développer la clientèle de l’entreprise;
  • documenter le savoir-faire des fondateurs et créer des processus qui peuvent être exécutés par d’autres personnes qualifiées après leur départ;
  • créer des redondances pour les fonctions vitales de l’entreprise ; et
  • prévoir des incitatifs suffisants pour fidéliser les employés clés de l’entreprise.

Exits typiques pour les entreprises bootstrapped

Entreprises bootstrapped

Une entreprise bootstrapped est une entreprise dont les fonds propres ont été financés par les ressources de ses fondateurs. En Suisse, la plupart des PME traditionnelles sont des entreprises bootstrapped, de même que proportion non négligeable de startups (technologiques).

Cela peut être possible soit parce que les fondateurs ont accès à des ressources considérables, soit parce que l’entreprise cible ne nécessite pas de coûts d’établissement élevés avant la mise sur le marché de son produit ou service.

Un exemple de startup technologique bootstrapped pourrait être celle fondée par des personnes qui ont déjà développé un logiciel en phase bêta (généralement au cours d’un doctorat). Elles n’auront pas besoin de ressources extérieures importantes pour commencer à avoir une croissance organique satisfaisante et peuvent donc se passer de financement en equity.

L’inconvénient du bootstrapping d’une entreprise est que sa croissance peut être plus lente. L’avantage est que les fondateurs restent propriétaires à 100 % de leur société.

Sur la base de ce qui précède et à condition que le business model visé le permette, il est conseillé d’éviter de rechercher un financement en equity si possible.

Exits typiques d’une entreprise bootstrapped

La croissance d’une entreprise bootstrapped est souvent moins exponentielle que celle d’une entreprise financée par equity. Les options d’exits sont donc légèrement différentes et impliquent un éventail plus large d’acheteurs potentiels.

Voici quelques exemples d’exits typiques pour ces entreprises :

  • Management buy-out ou MBO est une exit par laquelle les dirigeants existants d’une entreprise (qui peuvent être ou non actionnaires) la rachètent à ses fondateurs. L’avantage de ce type d’exit est que l’acquéreur connaît parfaitement l’entreprise, et donc (i) très peu de due diligence est nécessaire (ii) la transmission peut être plus progressive et (iii) les garanties données par les fondateurs peuvent être plus limitées. La difficulté des MBO réside souvent dans le financement du prix d’achat, qui doit régulièrement être complété par un prêt de tiers (banque) ou des vendeurs.
  • Management Buy-in ou MBIs sont similaires aux MBOs, mais les dirigeants entrants ne s’impliquent dans l’entreprise que dès la conclusion de la transaction. Il s’agit donc d’une forme d’acquisition stratégique par une personne physique qui souhaite devenir propriétaire de son entreprise.

Les MBI posent souvent le même problème de financement que les MBO, mais ils ne présentent pas les mêmes avantages en termes de simplicité, car l’acquéreur ne connaît pas l’entreprise cible.

  • Acquisition stratégique ou financière : Étant donné que les entreprises bootstrapped sont par définition détenues par leurs fondateurs, les acquisitions stratégiques ou financières proviendront d’une personne qui n’était pas impliquée auparavant en tant qu’actionnaire. Cela signifie que ces acheteurs devront se familiariser avec l’entreprise et se convaincre que l’entreprise pourra continuer à fonctionner sans risques importants après le départ de ses fondateurs.
  • Successions traditionnelles familiales ou de personnes proches, qui peuvent même souvent être gratuites. Dans ces types de transactions, une transmission progressive et sur mesure est souvent possible, ce qui les rend très différentes et plus faciles des autres. Les considérations fiscales déterminent souvent la structure et le processus de ces exits.

Comment préparer l’exit d’une entreprise bootstrapped ?

En général, les entreprises bootstrapped peuvent se contenter d’une organisation plus simple, puisqu’elles n’ont pas besoin de s’adapter aux besoins spécifiques des investisseurs en equity. Par exemple, la constitution de l’entreprise en société à responsabilité limitée peut être une option intéressante (puisque le capital minimum est également de CHF 20’000.- au lieu de CHF 100’000.- pour une société anonyme).

Nous conseillons toujours vivement aux entreprises en phase de démarrage d’établir des processus commerciaux et juridiques clairs, visibles et bien entretenus. Ceci est particulièrement important si un rachat est envisageable, qu’il soit stratégique ou financier. En effet, ces repreneurs sauteront sur souvent l’occasion de réduire l’évaluation de l’entreprise ou différer certains paiements, s’ils ont une quelconque légitimité à de telles demandes. Les arguments invoqués sont souvent le manque de clarté des processus, l’existence d’un risque quelconque ou le fait que les fondateurs jouent un rôle important dans le succès de l’entreprise.

Si vous pensez qu’un MBO ou une succession traditionnelle sont les options les plus probables, nous vous conseillons d’impliquer les successeurs potentiels le plus tôt possible dans la gestion de l’entreprise. De cette manière, vous leur donnez un avant-goût de leur avenir et rendrez la transmission progressive, ce qui facilitera la transition pour toutes les personnes concernées (y compris les employés, les clients et les fournisseurs). Impliquer vos successeurs dans la gestion de l’entreprise leur permettra également d’en connaître les processus, ce qui vous permettra de moins les formaliser. Pour impliquer vos successeurs potentiels, vous pouvez envisager de mettre en place des plans d’intéressement (ESOP) et d’inclure les personnes concernées dans la gouvernance de l’entreprise, par exemple en leur donnant un siège au conseil d’administration.

Points principaux à retenir

Dès le début d’une entreprise, les fondateurs doivent essayer d’avoir le plus de visibilité possible sur leurs objectifs à long terme, y compris l’exit. Ils doivent toutefois adapter constamment leurs attentes en matière d’exit en fonction de l’évolution de l’entreprise. Par exemple, un gros client ou un prix non-dilutif pourrait supprimer le besoin de financement en equity et permettre une croissance organique suffisante, ce qui modifiera les perspectives d’exit.

En pratique, nous suggérons aux fondateurs de préparer des projections financières à long terme complètes et honnêtes du développement de leur entreprise dans le cadre de leur business plan. De cette façon, ils auront une meilleure visibilité sur la croissance visée ainsi que les ressources financières nécessaires pour l’atteindre. Sur la base de ces informations, ils pourront décider si le bootstrapping de l’entreprise est une option ou si un financement en equity est nécessaire.

Si la nécessité d’un financement en equity est probable, alors les processus opérationnels et juridiques doivent être aussi propres que possible dès le début. En outre, dans la mesure du possible, l’entreprise devrait être constituée en société anonyme, qui est beaucoup plus apte à recevoir un financement par actions (notamment en raison de la flexibilité possible de sa structure de capital et de gouvernance). Finalement, pour maximiser la valorisation, les fondateurs doivent s’efforcer de rendre le succès de l’entreprise indépendant d’eux-mêmes.

Si les fondateurs pensent que le bootstrapping est possible, ils peuvent alors envisager une structure plus légère. La constitution d’une société à responsabilité limitée devient une option, permettant de réduire les exigences en matière de capital (CHF 20’000.- au lieu de CHF 100’000.- pour une société anonyme). La gestion juridique et opérationnelle devra toujours permettre à l’entreprise de fonctionner en toute sécurité, mais elle pourra être légèrement moins complète et détaillée. Enfin, les successeurs potentiels de l’entreprise doivent être vu comme tels dès que possible afin qu’ils puissent être impliqués de manière à faciliter la transmission le moment venu.

By Elie Bourdilloud

Head of M&A, Legal Expert

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